L’histoire des Chant’ Sans Pap’Yé s’inscrit dans la lutte de RESF
Un constat : les familles sans papiers n’ont pas où exprimer leur vie, leurs attentes, leurs peurs, leurs espoirs, les joies et les souffrances de leur quotidien. Face à cette situation, différents collectifs de RESF Rhône ont ressenti la nécessité et l’urgence de l’expression des familles. Une petite équipe, Mireille, Florence, Sylvie, Catherine, Sandrine et Denise a pris l’initiative d’organiser des ateliers d’expression et a travaillé sur le choix des supports.
Des ateliers d’expression ont donc été proposés et des personnes soutiens des différents collectifs RESF ont prêté main forte pour mobiliser dans leurs collectifs, accompagner et faciliter l’expression.
Au fil des années, ces ateliers ont utilisé différentes formes d’expression : écriture, dessin, réalisation d’affiches ; une enseignante, Mireille, a aussi proposé un temps chansons au cours de ces ateliers avec des reprises de Michèle Bernard, Marie Zambon, Marie-Anne Isnard-Michel…
Les familles qui ont participé à ces ateliers ont apprécié les différents supports proposés et se sont saisis de la possibilité d’expression que cela leur a donné, chacun comme il peut, là où il en est, mais chacun réveillant ainsi l’énergie qui est en lui. Exprimer la vie, les émotions, les attentes, les peurs pour être reconnu, loin des images stéréotypées.
Dans le cadre de RESF, des concerts de soutien ont permis que cette expression, ce témoignage sorte au grand jour. Des évènements tels que La semaine de la langue française, nous ont permis de rejoindre et côtoyer d’autres expressions, de découvrir d’autres lieux, de rencontrer des publics différents. Tout au long de ce travail ensemble mêlant nos compétences et nos différences de professions, de cultures, de caractères, de sensibilités, de savoir-faire… nous avons trouvé des chemins d’expression partagée. Au départ, militants accompagnant ces ateliers, nous avons aussi appris à y mêler notre expression, notre vécu dans la lutte commune avec RESF et au-delà.
Une initiative de RESF au niveau national est venue bousculer et renforcer cette évolution. Il était proposé à tous d’écrire à Monsieur Hortefeux alors ministre de « l’immigration, de l’intégration, de l’identité nationale et du co-développement », pour témoigner des richesses de la vie partagée avec les familles immigrées et de notre volonté de leur faire toute leur place ici. Les témoignages étaient tels qu’à Lyon RESF a choisi d’organiser une soirée publique le 29 avril 2008 : « Je tenais à vous le dire ».
En 2007, une campagne de lettres de citoyens à monsieur Hortefeux, alors ministre de « l’Immigration, de l’intégration, de l’identité nationale et du codéveloppement », avait été lancée au niveau national.
Les témoignages étaient tels qu’ils ont donné lieu à un spectacle intitulé « Je tenais à vous le dire ».
La lecture théâtralisée de ces lettres accompagnées de chansons par différents artistes de la région ainsi que la chorale de RESF, a été donnée à Lyon le 29 avril 2008.
Ce projet nous a permis de rencontrer différents artistes qui ont accompagné la lecture de ces lettres : mise en scène, chansons, théâtralisation des lectures. Ce fut notre première rencontre avec Sophie Gentils et l’expérience qu’il était possible et passionnant de travailler ensemble. Elle avait en effet tenu la mise en scène, construite à partir d’un travail dramaturgique dans lequel elle nous avait pleinement intégrés.
Au fil des ateliers d’expression, plus de soixante-dix pages de texte avaient été écrites. Le groupe d’animation s’est interrogé sur la manière de faire connaître plus largement ces écrits qui ne pouvaient rester au fond d’un tiroir. Il a été décidé de refaire appel à Sophie Gentils. Auteure compositrice interprète, c’est par la chanson qu’elle a su donner écho aux textes que nous lui avions remis. Son travail de mise en chansons, fidèle à la parole des auteurs, a permis de mettre à jour bon nombre d’expressions qui, dans le flot de l’écriture, avaient moins de relief. Les premières chansons écrites, Sophie a proposé de constituer un groupe pour les interpréter. La proposition a été faite aux participants et 26 d’entre eux ont accepté de tenter l’aventure.
Naissance et début du groupe
Octobre 2011 : premier week-end de travail à la campagne et apprentissage des premières chansons. 4 novembre 2011 : premier concert à l’Espace Albert Camus de Bron.
S’ensuivent de nombreux autres, ainsi que la participation à des manifestations et à des parrainages républicains. Dans la même démarche pour faire entendre ces témoignages, un premier CD est enregistré : « Vivre-URGENT », distingué par une mention « coup de cœur » de l’Académie Charles Cros.
Deux mille exemplaires ont été diffusés depuis sa sortie en novembre 2014.
Collectif Les Chant’ Sans Pap’Yé-RESF
Actif depuis 2011, c’est en mai 2014 que le groupe se constitue officiellement en collectif : Les Chant’ Sans Pap’Yé-RESF.
Le collectif est constitué majoritairement de membres présents depuis le départ et oscille entre 20 et 30 personnes suivant les périodes, évoluant au rythme des événements de la vie de chacun.
Une des singularités du groupe réside certes dans son aspect interculturel mais aussi dans son coté intergénérationnel (au commencement la benjamine avait 3 ans et la doyenne 69 ans).
Le rythme des ateliers/répétitions : en moyenne, une fois par mois, complétés par un à deux week-ends par an ; auxquels s’ajoutent les concerts, les manifestations, la participation et l’organisation d’ateliers d’expression ouverts à tous les collectifs.
La situation et toutes ces actions ont permis à chacun de tisser des liens forts, ce qui fait que même si Les Chant’ sans pap’Yé-RESF sont un outil de lutte, c’est aussi et peut-être avant tout une expérience de vie faite de rencontres :
D’ateliers d’écriture en répétitions, de concerts en enregistrements, l’aventure commune des Chant’sans pap’yé a permis à chacun une intensité de vie, une intensité de partage qui nous ont faits plus vivants, plus heureux, plus solidaires.